LA DANSE DES POSSIBLES : Ode à l’incertitude…
Être tout à la fois : l’audace d’un chemin sans garantie
La vie m’a ramenée.
Après 16 mois de voyage, d’un souffle qui m’a portée de la France jusqu’aux rivages des origines, je me tiens là, face à la réalité multiple que j’ai construite. Ce n’est pas un retour, c’est une métamorphose. Mais aujourd’hui, je dois être tout à la fois.
Maman, photographe, autrice, réalisatrice. Pèlerine des sens et des âmes. Je dois rouvrir des projets endormis, porter des rêves encore fragiles, guider des chemins qui n’existent pas encore. Réaliser mon podcast L’Odyssée de l’Être, ouvrir la Via Magdalena comme on ouvre une porte sacrée, un passage vers l’essentiel. Tout cela, sans aucune garantie.
Pas de certitudes, pas de filet de sécurité. Rien, sinon une foi profonde en la nécessité de ce que je fais. Et c’est précisément dans cette absence de garantie que je trouve la vérité : la vie, comme un pèlerinage, n’offre jamais de promesses. Elle offre seulement des pas.
La vie sans filet
Revenir, c’est accepter la confrontation. À une société qui réclame des cases, des étiquettes, des bilans mesurables. Revenir, c’est entendre ces voix – extérieures, mais aussi intérieures – qui murmurent : « Pourquoi ne pas simplifier ? Pourquoi ne pas choisir ? » Mais comment choisir quand la vie elle-même est si vaste, si éclatée, si infinie… Si génialissime et éparpillée ?
Je suis une femme multiple dans un monde qui valorise la spécialisation. Être photographe aurait suffi. Être marcheuse aurait suffi. Être autrice aurait suffi. Être mystique aurait largement suffi. Même être mère aurait suffi… Mais je ne peux pas me limiter. Chaque facette de moi raconte une histoire différente, chaque passion nourrit les autres. Quand je marche, je pense comme une photographe. Quand j’écris, je marche dans mes souvenirs. Et quand je guide d’autres pèlerins, je vois dans leurs pas une forme d’écriture vivante.
Et vous ? Combien de facettes de vous-même laissez-vous dans l’ombre pour coller à ce que l’on attend de vous ?
La tyrannie de la spécialisation
On nous dit qu’il faut choisir, qu’il faut exceller dans un domaine.Qu’il faut devenir une pointe de flèche, capable de transpercer les barrières du succès. Mais qu’arrive-t-il à cette flèche lorsqu’elle rate sa cible ?
Tiens… Il me semble que c’est littéralement la traduction du mot PÉCHER… En Hébreux.
Pécher signifie rater la cible, ou manquer le but, en hébreu חָטָא (Rhata).
J’ai rencontré tant de gens, sur le chemin, qui portaient en eux les cicatrices de ce choix imposé. Un homme qui avait consacré toute sa vie à une carrière prestigieuse, mais qui se sentait vide une fois arrivé au sommet. Une femme qui avait abandonné ses rêves d’artiste pour devenir une “bonne mère” selon les normes de la société. Ces histoires résonnent en moi comme des avertissements.
Je refuse de me réduire. Refusez-vous aussi ?
Pourquoi se réduire ou répondre à des normes ? Cela n’a aucun sens étant donné que la vie a une fin et que nous sommes ici pour vivre et jouer au jeu de la vie… Non ?
La puissance de la multiplicité
Être tout à la fois n’est pas une faiblesse. C’est un acte de résistance, un acte de foi. Cela demande de l’audace, oui. Cela demande de marcher dans le brouillard, sans savoir où l’on va. Mais cette incertitude est la source même de la vie.
Quand je marche, je ne sais jamais ce que je vais trouver au prochain virage. CAMINO PROVIDES… Vous vous souvenez ? Une étendue de lumière ? Une montée abrupte ? Une averse battante ? Mais ce sont précisément ces imprévus qui donnent au chemin sa saveur.
Et dans la vie, c’est pareil. Chaque projet, chaque rôle, chaque facette de moi-même apporte son lot d’imprévus, de doutes, d’enseignements. La photographie m’enseigne à cadrer mes pas. La marche m’apprend la lenteur et la modestie. Mes enfants me rappellent que l’instant présent est tout ce qui compte.
Et vous, qu’apprenez-vous de vos multiples vies ? Les faites-vous danser ensemble ?
Une invitation au vertige
Aujourd’hui, je me tiens sur une corde tendue, avec le vide sous mes pieds. Je ne sais pas si mes projets aboutiront. Je ne sais pas si la Via Magdalena sera empruntée, si mon podcast trouvera des oreilles pour l’écouter, si mes photos parleront encore. Mais ce que je sais, c’est que marcher sur ce fil est la seule manière d’être vivante et que c’est bon de se réveiller le matin en se disant whaouuuuu… J’ai un millions de choses qui me passionnent à construire aujourd’hui !
Peut-être que vous aussi, vous sentez ce vertige de devoir tout être à la fois. Peut-être que vous ressentez cette injonction à choisir, à vous spécialiser, à entrer dans une case confortable. Mais je vous invite à envisager une autre voie : celle de la multiplicité, du désordre créatif, du chemin sans garantie.
Et si le vrai courage, ce n’était pas de réussir, mais d’oser avancer sans filet ?
Au fond, ce n’est pas en se limitant qu’on trouve sa vérité. C’est en acceptant d’être vaste, contradictoire, indéfini. C’est en embrassant l’incertitude, en laissant nos multiples facettes se croiser, se nourrir, s’aimer.
Alors, je vous laisse avec cette question : qu’avez-vous laissé dans l’ombre de votre vie ? Quelle facette de vous-même attend encore de prendre la lumière ?
La vie n’offre jamais de garanties. Elle n’offre que des chemins. Le reste, c’est à vous de l’inventer.
À dimanche prochain, pour la suite de ce voyage.
Avec toute ma bienveillance et mon amitié,
Céline Anaya Gautier
Exploratrice de la nature humaine, Marcheuse au long cours et tant d’autres choses…